5 octobre 2020

Pourquoi les entreprises inclusives vont devenir essentielles.

Pourquoi les entreprises inclusives vont devenir essentielles : après la « piqûre » des subventions, comment entreprises et investisseurs vont financer la transition du S de l’ESG ? Retrouvez l’analyse de Phitrust avec le témoignage d’Alain de Crombrugghe.

10 millions de pauvres en France selon le Secours Catholique. Au moins 840.000 emplois détruits en 2020 selon l’INSEE. 1 million de jeunes, sans emploi ni formation recensée par la DARES. Mi-novembre, l’Unedic soulignait que 20% des demandeurs d’emploi recherchent des emplois dans les métiers les plus fortement impactés. Hôtellerie, tourisme, restauration, événementiel. Des secteurs ou les offres ont baissé de 50 % ou plus. C’est particulièrement difficile pour les jeunes qui commencent à travailler… Sans parler de l’effort de financement massif pour reconvertir les chômeurs, face aux défis de la digitalisation, le COVID-19 ayant agi comme un accélérateur de la transformation digitale. La crise sociale est là avec déjà plusieurs annonces de plans sociaux qui concernent plus de 30 000 emplois, avant les probables défaillances d’entreprises qui devraient rythmer 2021. L’emploi et la lutte contre le chômage, qui préoccupaient moins les Français ces derniers temps, sont redevenus leur priorité absolue, selon un récent sondage Viavoice. La question sociale va devoir prendre toute sa place dans l’économie et la finance.

La gestion thématique a le vent en poupe auprès des investisseurs. Si on a vu fleurir les fonds à thématique environnementale, les stratégies à visée sociale – le «S» de l’ESG – restent plus limitées.  Des fonds abordent le thème de la diversité ou de l’égalité hommes/femmes, d’autres la qualité de vie au travail. Le problème reste de pouvoir se fonder sur des données concrètes et significatives, la thématique sociale relevant plutôt de la culture d’entreprise, d’où une mesure d’impact plus difficile. D’autres essaient de cibler des thématiques plus sociétales comme des fonds focalisés sur les entreprises actives dans la lutte contre le cancer ou des fonds investis en priorité dans les entreprises qui créent de l’emploi en France.

Si l’enjeu social s’accroit comme cela est probable, il impose d’aller plus loin et d’en faire un critère transversal. Pour que le « S » irrigue l’ensemble de la finance – et pas seulement des fonds ciblés- au même titre du « E », et sans les dissocier,  les investisseurs, et donc les actionnaires,  ont une capacité d’effet de levier très forte. Comme le souligne Alexis Masse, Président du FIR, dans une étude pour le think tank Terra Nova « là où plusieurs prestataires sont disponibles en matière environnementale, il n’existe pas de prestataire disposant d’une méthodologie équivalente pour éviter un partage injuste de  la  valeur,  mesurer  l’accès  à  un  salaire  décent,  la  qualité  du  dialogue  social,  la responsabilité d’une entreprise sur sa chaîne de sous-traitance, l’accompagnement de la main-d’œuvre dans les transitions, comme il n’existe pas de label assurant la qualité sociale des fonds, qui pourrait ensuite irriguer les politiques d’entreprises financières tout entières. »

En attendant un tel label, comment pousser le volet social des investissements ?

Par le biais d’une stratégie d’engagement actionnarial active, constructive et de long terme pour challenger l’ensemble des entreprises sur ce sujet. Comme Phitrust l’a fait lors des AG 2020 en appelant les entreprises du CAC 40 susceptibles de verser des dividendes d’en consacrer une partie à la création de fonds de dotation pour soutenir leur écosystème fragilisé par la crise. Plusieurs l’ont fait comme Essilor pour soutenir leurs salariés et leurs familles vivant dans des pays sans filets sociaux. D’autres ont abondé les dotations de leurs fondations ou fait des versements à des fondations d’intérêt général. Peu sont allés jusqu’à la création de tels fonds d’investissement d’impact comme Danone l’a fait avec le fonds Danone Ecosystem juste après la crise de 2008, ou encore Schneider avec le fonds Schneider Energy Access comprenant qu’on ne peut prospérer dans une société fracturée.

Plusieurs dirigeants d’entreprises ont co-signé en juin dernier une tribune dans le Figaro pour appeler à un plan de relance et de soutien pour les entreprises qui embauchent des salariés en situation de fragilité ou de handicap. Prouvant ainsi le rôle qu’ont à jouer les entreprises. Aux actionnaires également de jouer le leur en les soutenant…. Quitte à challenger les résultats et les modalités de partage de la valeur par des actions d’engagement.

La finance solidaire est aussi un moyen de faire grandir des projets à forte utilité sociale, comme le fait Phitrust avec les fonds Phitrust Partenaires et Phitrust Partenaires Europe (labellisés EuSEF). De tels fonds sont aussi accessibles via la poche de 10 % des fonds d’épargne salariale dédiée à des projets qui privilégient l’impact social sur la rentabilité, les 90 % restants privilégiant la rentabilité sur l’impact social, sans l’exclure. Là encore, les investisseurs doivent savoir quels impacts ils cherchent à obtenir. Et avec quelle profondeur. Financer et accompagner des entreprises de formation et de réinsertion comme Simplon – qui forme aux métiers du code des personnes éloignées de l’emploi, des salariés proches de la déqualification, des jeunes décrocheurs scolaires, ou des entreprises d’insertion par l’activité économique comme La Varappe, Ecodair ou Main Forte, implique des durées d’investissement longues, un accompagnement stratégique et opérationnel, des attentes de TRI plus proches de 5% que de 10% comme pour un fonds de private equity « classique ». Cela passe aussi par la revalorisation de métiers peu ou pas assez reconnus comme Alenvi le réalise en réinventant les conditions d’emplois et de formation des auxiliaires de vie dont la société française aura de plus en plus besoin dans les années à venir. De nombreux entrepreneurs sociaux apportent des solutions innovantes à ces enjeux d’accès à l’emploi, revalorisation, reconversion, formation. L’augmentation de leurs impacts passe aussi par des partenariats avec les entreprises classiques, comme le fait La Varappe avec le Groupe Vinci ou La laiterie du Berger avec Danone.

Phitrust qui depuis sa création a fait de l’inclusion son fil rouge d’investissement souhaite lancer un troisième fonds à vocation européenne  pour répondre à ces enjeux croissants. Et favoriser encore toujours plus les passerelles entre les entreprises qu’elles questionnent chaque année via son pôle d’engagement actionnarial et ces entrepreneurs sociaux, forces de transformation de notre société.

Retrouvez l’interview d’Adrien de Crombrugghe « L’inclusion est au coeur de mes préoccupations d’investisseur » ici

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